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"Croire" et "penser" selon Ferdinand BUISSON

Communiqué d'Yves ROUTIER.

Ferdinand Buisson (1841-1902)

Cofondateur et président de la Ligue des droits de l'Homme, fonctionnaire, député radical, Inspecteur Général de l’Instruction Publique  choisi en février 1879 par Jules Ferry, comme Directeur de l’enseignement primaire, Ferdinand Buisson est célèbre pour son combat en faveur de l'enseignement laïque.

Il a été président de la Ligue de l'Enseignement" de1902 à 1906.


Pour en savoir plus sur ce grand homme  --> https://memoires.laligue.org/portraits/laicite/ferdinand-buisson
Dans le texte ci-dessous, il distingue "croire" et "penser":

     "Le premier devoir d’une République est de faire des républicains ; et l’on ne fait pas un républicain comme on fait un catholique. Pour faire un catholique, il suffit de lui imposer la vérité toute faite. Le maître a parlé, le fidèle répète. Il a été dit un catholique ; mais on pourrait tout aussi bien dire un protestant ou un croyant quelconque […]. Toute éducation cléricale aboutit à ce comportement : croire et obéir, foi aveugle et obéissance passive […].

     Pour faire un républicain, il faut prendre l’être humain si petit et si humble qu’il soit (un enfant, un adolescent, l’homme le plus inculte, le travailleur le plus accablé par l’excès de travail) et lui donner l’idée qu’il peut penser par lui-même, qu’il ne doit ni foi ni obéissance à personne, que c’est à lui de chercher la vérité et non pas à la recevoir toute faite d’un maître, d’un directeur, d’un chef quel qu’il soit, temporel ou spirituel.

     Est-ce qu’on apprend à penser comme on apprend à croire ?

     Croire, c’est ce qu’il y a de plus facile ; et penser, ce qu’il y a de plus difficile au monde. Pour arriver à juger soi-même d’après la raison, il faut un long et minutieux apprentissage ; cela demande des années, cela suppose un exercice méthodique et prolongé.

     C’est qu’il s’agit de rien moins que de faire un esprit libre. Et si vous voulez faire un esprit libre, qui est-ce qui doit s’en charger sinon un autre esprit libre ? Et comment celui-ci formera-t-il celui-là ? Il lui apprendra la liberté en la lui faisant pratiquer […].

     Il n’y a pas d’éducation libérale là où l’on ne met pas l’intelligence en face d’affirmations diverses, d’opinions contraires, en présence du pour et du contre, en lui disant : Compare et choisis toi-même ! "

Commentaires

1. Le Lundi 16 septembre 2024, à 09:28 par Bertrand DANIEL

Merci de ces quelques lignes qui font du bien. Peut-on savoir de quel texte de Ferdinand Buisson proviennent ces extraits ?
Bonjour à vous tou.te.s !
Bertrand

2. Le mercredi 18 septembre 2024, à 15:33 par Superadmin

Bonjour Bertrand,
Contente que le texte de Ferdinand Buisson t'ait plu.
Il a été relayé par diverses associations dont la Ligue de l'enseignement mais l'origine est à chercher dans son  "Discours au 3ème congrès annuel du Parti Républicain Radical et Radical Socialiste, Marseille, Octobre 1903".
Voici la suite qui n'était pas mentionnée sur le blog, qui est moins percutante mais aussi très intéressante :

Sans doute, il y a des vérités incontestables, mais celles-là, l'Etat n’a pas besoin de les imposer : personne ne les conteste. Telles
sont les vérités mathématiques, les lois fondées sur l'expérience dans tous les ordres de science. Celles-là, l’Etat les enseigne,
non à titre de dogmes, mais à titre de vérités démontrées et que chacun peut toujours vérifier. Quant aux autres, aux croyances,
aux opinions, aux hypothèses, aux convictions religieuses, par exemple, l'Etat ne les enseigne pas. Mais il ne veut accorder à
aucune d'elles un rang privilégié, le droit de parler seule et d’étouffer la contradiction. Non, l'Etat républicain, qui a charge
d'âmes, qui doit rendre les comptes de la génération présente aux générations de demain ; non, il n'a pas le droit de permettre
que l'on élève les enfants de la France dans l’ignorance systématique de ce qu'il leur importe de savoir. Il a le droit d’exiger
qu'on leur apprenne qu'il y a plusieurs religions sur la terre et comment elles se sont faites. Il a le droit de leur apprendre lui-
même l'histoire des religions, sans avoir celui de leur en donner une toute faite. Il ne dit pas : « Voilà mon dogme, voilà ce qu'il
faut croire » ; mais il ne laissera pas enfermer les enfants, sous prétexte de ménager Ieur foi, dans une éducation exclusive qui
leur cachera la multiplicité des religions humaines, et la longue suite des transformations du dogme correspondant à celles de la
civilisation.
Il importe à la démocratie de ne pas ignorer le passé de l'esprit humain et je dis que l’histoire des religions est à mettre au
nombre de ces enseignements scientifiques indispensables pour former des républicains.

Amicalement

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